Correction d’un devoir, à minuit moins le quart. Coup d’oeil consterné devant la pile de copies restantes, je soupire et me remets courageusement à la lecture de la copie d’Eddy. Syntaxe approximative, orthographe parfois phonétique, ponctuation défaillante : je biffe, je rature en rouge et en colère, quand soudain je tombe sur cette phrase fulgurante et limpideᅠ: «Il nomme le vivant des textes». Un premier réflexe de professeur normé et normatif me fait écrire dans la marge m.d. (mal dit) mais non, au contraire, c’est bien dit. Eddy a vu plus que la personnification de l’oeuvre de Balzac ou que l’emploi métonymique du livre pour l’écrivain (pour cette oraison funèbre de Balzac prononcé par Hugo) ; il a vu qu’une fois l’écrivain mort, le texte continue à vivre. Il l’a vu et l’a écrit. A sa manière. Et rien de plus à ajouter. Cette seule phrase illumine ma soirée, danse dans ma tête et me met du baume au coeur pour la correction des autres copies. Merci Eddy. Il faut que tu gardes cela, Eddy, que tu améliores ta syntaxe, mais que tu gardes cet art du raccourci, cette langue acéré qui va à l’essentiel.
Christine Zottele
Rentrez sans moi
éditions QasaQ
http://www.qazaq.fr/pages/rentrez-sans-moi/
photo Philippe Marc
Un grand merci Brigitte pour Eddy surtout (qui existe vraiment) et j’espère vit bellement sa vie de vivant…
moi aussi – depuis j’ai fini le livre cette nuit et me disais : tiens j’aurais dû prendre cela plutôt, mais j’aimais bien Eddy et sa syntaxe éclair
Les mots vivent autrement et c’est merveille de s’en rendre compte